Ukraine: Spring & Summer

Texte publié par Sara Daniel dans l'OBS sept 2022Devant la morgue, entre deux haut-le-cœur, un homme crie son impuissance. La police lui a demandé de venir chercher le corps de son frère, mais

la babouchka, à l’accueil, ne cesse de lui présenter des cadavres bleutés auxquels manquent les tatouages que celui-ci por- tait sur les bras. L’endroit n’a pas été réfri- géré depuis six mois, et la vieille femme est dépassée par la métamorphose des corps qui s’entassent. Ce n’est pas la guerre qui a tué Micha, pas directement. Quelques jours après la libération de la ville par les Ukrainiens, son épouse l’a quitté et Micha s’est pendu.

Une femme sur le perron de sa datcha insulte les journalistes venus l’interroger : « Que voulez-vous savoir ? Que le corps de mon fils tué par les Russes a flotté dans la rivière pendant trois mois ? Dégagez ! » Sur la place, devant le camion de l’aide alimentaire, deux femmes en viennent aux mains pour une miche de pain blanc. Assis sur un banc, au pied d’une barre d’im- meuble, un homme pleure : « Ils m’accusent d’avoir collaboré, mais est-ce un crime que de vouloir rester chez soi ? Je n’ai fait que vendre les champignons ramassés dans la forêt ! » Devant l’hôpital militaire, Ser- gueï Petrovitch Botsman, ambulancier en chef, vocifère contre les soldats ukrai- niens alcoolisés qui ont fêté leur victoire tard dans la nuit en tirant de longues sal- ves vers les étoiles. Sergueï est un héros : il a passé toute l’occupation à convoyer des civils sur des brancards. Lorsque les bombardements commençaient, il mon- tait à Kremenetz, la colline qui surplombe la ville, afin de repérer où tombaient les missiles avant de s’y précipiter pour ramas- ser les blessés. Pendant toute la durée de l’occupation russe, il a refusé d’enlever son écusson aux couleurs de l’Ukraine, mais désormais il a besoin de dormir. A Izioum, les héros aussi sont fatigués.

Dans cette ville de l’est du pays, libérée par les Ukrainiens lors de la grande offen- sive de septembre, plusieurs centaines de sépultures ont été découvertes après le retrait des troupes russes. Pour y témoi- gner des crimes du Kremlin, Zelensky avait invité la presse internationale à assister aux exhumations des corps du cimetière Shakespeare, dans la forêt de grands pins qui longe la bourgade. Mais à Izioum, à la litanie des morts s’ajoutent les souvenirs des survivants : détruite à 80 %, cette ville fut aussi un laboratoire de l’occupation russe. Pendant six mois, les 15 000 Ukrai- niens qui y sont restés ont dû subir la loi d’airain des hommes de Poutine.

Et aujourd’hui l’heure des comptes

a sonné. Collabos, salauds, héros, chacun a des noms en tête.

A l’hôtel de ville, par exemple, le vice- maire Volodymyr Vatsokine, revenu le 13 septembre, me récite d’une traite la liste de ses concitoyens frappés d’indignité. Au moment où il évoque leur nom, ils sont soit en fuite en Russie, soit interrogés par l’ar- mée dans un lieu sûr. « Il y a Anatoli Fomi- chevesky, membre du gouvernement local ;

Oleksander Pachkov, directeur de l’hôpital ; Lubov Goja, directrice des programmes de russification. Et puis il y a Galina Zavali- china ; Oleksander Zaporochenko ; Lubo Katchenko ; Maxim Chtelemark ; Natalia Malik ; Ivgueni Martinov. » Impossible de l’arrêter. A la tête de ce clan d’indignes, poursuit le vice-maire, se trouve « Vladis- lav Sokolov ». Avant la guerre, ce dernier était déjà suspecté d’être un agent dor- mant dont le fils servait dans la marine russe basée à Sébastopol. Cet ex-policier, vendeur de drogue, se présentait à toutes

les élections, qu’il perdait toujours. Il était flanqué de son adjoint, Hleb Tkachenko : « Lui, c’était le vrai salaud, le type cynique, capable de tout. » Volodymyr Vatsokine voudrait une loi pour dérussi- fier l’Ukraine. « Par exemple, nos professeurs partis se “for- mer” en Russie ne devraient pas pouvoir reprendre leur travail ici ! » Il faudrait également traiter le cas de « tous ceux qui ont dénoncé leurs voisins, leurs cousins ou leurs collègues aux Russes. Vousnepouvezpasimaginerle nombre de lettres de dénoncia- tion retrouvées dans les papiers

abandonnés », affirme le vice-maire. « Cette idée de dérussification de la population est dangereuse ! » commente Belkis Wille de l’organisation humanitaire Human Rights Watch, qui recueille les témoignages de victimes des Russes dans la ville. « Souve- nez-vous en Irak, c’est la “débaasification” qui a crucifié le pays, en faisant naître la rancœur chez tous les vaincus. »

SYSTÈME MAFIEUX

Pour comprendre comment la « collabo- ration » s’est mise en place à Izioum, il faut reprendre le chemin des morts. Au bureau des pompes funèbres, entre les cercueils et les couronnes multicolores de fausses fleurs, Larissa, une employée, m’explique le système mafieux qui s’est progressivement instauré. « L’entreprise de pompes funèbres d’Izioum était un business florissant sous l’occupation », dit-elle. Pas moins de cinq bureaux, dirigés d’une main de fer par Lyudmila Stetsenko et son petit-fils Igor. « Un jour de mai, le “Gauleiter” Sokolov [sur- nommé comme les responsables régionaux nazis, NDLR] et son fameux adjoint Hleb Tkachenko sont venus nous voir et nous ont dit : “Vous voulez vous faire de l’argent ?” Nous, on a répondu : “Evidemment !” “Alors commencez par enterrer gratuitement les

morts à Shakespeare et on vous laissera reprendre votre business.” » Les corps, qui s’entassaient sur les trottoirs, commen- çaient à dégager une odeur insupportable à cause de la chaleur. Avec Vitali, le croque- mort, Larissa a donc récupéré les cadavres que les soldats russes ramassaient dans le centre-ville. « On les chargeait au niveau du pont qui enjambe la rivière Donets et on les inhumait à Shakespeare sans cercueils. Au total, nous avons numéroté et photogra- phié 453 corps. Et puis, parallèlement, on a recommencé à faire payer les enterrements. Au prix de 8 000 hryvnia [223 euros] au lieu de 5 000 [139 euros] avant la guerre. On était un peu débordés, alors on a demandé de l’aide aux Russes qui nous ont donné de l’essence et de la nourriture. Lyudmila Stetsenko et son petit-fils ont fini par quitter la ville, mais nous, on a continué le business. Honnêtement, les soldats russes étaient cor- rects, ils nous aidaient, donnaient des bon- bons aux enfants. C’étaient les soldats des républiques séparatistes de Louhansk et de Donetsk qui étaient infects. »

Comment Larissa a-t-elle eu ce job lucratif en temps de guerre ? En fait, elle connaissait le Gauleiter Sokolov, qui était gardien de sécurité à la banque Privat où elle-même travaillait. « Je l’évitais à

l’époque, il était poisseux, toujours à dra- guer les filles. » Après l’invasion de la ville le 5 mars, elle a entendu un homme faire un discours dans la rue, et a reconnu le vigile de la banque. Elle n’en croyait pas ses oreilles : « Il disait : “Vous devez reprendre le travail le 1er mai, tout est calme désor- mais...” Et pendant ce temps on entendait les bombes », se rappelle Larissa dans un éclat de rire. Elle connaissait également Hleb Tkachenko : « Un jour, je lui ai demandé pourquoi on n’enterrait les corps que superfi- ciellement. Il m’a répondu que, bientôt, nous les exhumerions pour faire payer aux Ukrai- niens leurs crimes. » Comme elle gagnait de l’argent, Tkachenko lui a demandé

si elle voulait ouvrir un compte en roubles : « Mais moi, je ne voulais pas deve- nir russe. C’était dur de vivre dans une ville occupée par les Russes, leurs ordres, leurs drapeaux, leur radio. Mais le pire, c’étaient les pilleurs, russes ou ukrainiens : ils volaient une boutique et en ouvraient une aussitôt pour vendre ce qu’ils avaient dérobé. »

CENTRE DE TORTURE

Je rencontre Viktor un soir sur la place centrale d’Izioum dans la file d’attente pour l’aide alimentaire. Ex-employé du gaz, à 46 ans, il a ce teint gris des hommes brisés par les épreuves et l’alcool. Sa petite datcha, où prospère un riche potager, était occupée, avant les Russes, par les soldats ukrainiens. Lors de leur fuite, en mars, ils ont laissé derrière eux leurs armes et leurs uniformes. Un des voisins de Viktor, qui enviait sa propriété et ses légumes, l’a dénoncé au nouveau Gauleiter. Les soldats russes sont venus le chercher, l’ont mis en joue et l’ont conduit dans les prisons du commissariat central d’Izioum, transformé en centre de torture.

Viktor m’emmène dans ce lieu terrible, aujourd’hui ouvert aux quatre vents. Sur la guérite de l’entrée, un casque rempli d’eau de pluie, des douilles, un couteau et un exemplaire en russe de « Crime et Châtiment » de Dostoïevski. On dirait une mise en scène, dans cette ville où l’on finit par douter de tous et de tout. Dans la cellule du rez-de-chaussée, Vik- tor examine chaque objet, la gamelle en étain, le vieux matelas, la cuillère en bois. « Rien n’a changé. » Il a passé plus de quinze jours ici, entrecoupés de visites à l’hôpital en raison de ses crises d’épilepsie, quand les coups étaient trop violents. Au sous-sol étaient détenus les condamnés à mort. « Par la fenêtre, je pouvais parler à un type de la défense ter- ritoriale, qui était dans la cellule au-des- sous de la mienne. Il portait une sorte

de muselière. Un jour, il m’a demandé une cigarette, je lui en ai lancé une mais il n’a pas pu l’attraper. Quand les soldats russes sont entrés dans sa cellule, il m’a dit : “Au revoir, je vais mourir”, et j’ai entendu deux coups de feu. » Viktor est comme possédé par ce souvenir, il ne me regarde plus, il est fiévreux, comme ces personnages de Dostoïevski hantés par les crimes du passé. Il caresse un short noir aux rayures blanches qui pend à la patère de la geôle, comme pour s’assurer qu’il n’a pas d’hal- lucinations. Ce vêtement appartenait au jeune homme qui partageait sa cellule. « Un soir, les soldats de Louhansk sont entrés dans notre cellule, ils ont apporté un seau d’eau, et ont demandé à Micha de se laver. Puis ils l’ont emmené et l’ont violé. Peu de temps après, on m’a libéré, je ne l’ai plus jamais revu. Le short noir, c’était son seul vêtement... » Un soldat de Louhansk qui violait les hommes était surnommé « Bolchoï » (le gros). « Il nous disait : “Par le nom de la Fédération de Russie, nous vous apprendrons à vivre.” » Il tabassait les hommes, puis les violait. Lorsqu’il nous montre la banquette marron défoncée, protégée des regards par un drap tendu, sur laquelle les viols avaient lieu, Viktor a la nausée et fait un bond en arrière.

Au bout de quelques semaines d’occupa- tion, c’est la police de Louhansk qui a rem- placé les soldats au rez-de-chaussée. Elle

avait promis à la population qu’elle serait intraitable concernant les crimes. Un jeune homme, qui avait subtilisé une télé dans la maison de son voisin parti pour Kiev, a été tellement battu par Bolchoï qu’il en est devenu fou. Les pilleurs, les criminels ukrainiens étaient envoyés directement à Voronej, en Russie. Sur le sol de la prison traîne une affichette du temps de l’occu- pation. On y voit la photo d’un voleur qui aurait confessé ses méfaits, avec ce slogan : « Grâce à la police de Louhansk vous êtes en sécurité. » Les troupes venues de Russie, elles, ne s’intéressaient qu’aux prisonniers du sous-sol, les paramilitaires ukrainiens. Les soldats les torturaient jusqu’à la mort pour leur soutirer des informations.

Sacha Gluchko, 53 ans, a été un de ces morts en sursis au sous-sol. Parce qu’il était un des membres de l’organisation antiter- roriste créée par l’ancien président ukrai- nien Petro Poroshenko en 2014, des Tché- tchènes l’ont ligoté, pieds et poings liés, et torturé à l’électricité. Sa tête cagoulée a été frappée avec un casque. Par deux fois il a été conduit inconscient à l’hôpital. Il par- tageait sa cellule avec un médecin, Andrej, qui avait perdu toutes ses dents sous les coups de poing. Et avec un vieil homme, Ivan Chedaï, qui s’est retrouvé au sous-sol des morts à cause d’un voisin qui l’a traité d’indic... Et puis le 9 septembre, un homme leur a ouvert la porte. Les Russes étaient

en train de fuir la ville. La maison des tor- tures comptait alors 24 prisonniers.

Si Sacha Gluchko a pu remarcher, c’est grâce à Youri Evguenievitch Kouzniet- sov, chef du département de traumatolo- gie de l’hôpital d’Izioum. Une gueule ren- frognée à la Lino Ventura, le cœur sur la main. Enchaînant les visites, vingt heures par jour, il est le seul médecin à être resté dans la ville malgré les obus qui pleuvaient sur son hôpital et lui ont causé un trauma- tisme crânien. Il opérait au sous-sol. Et même après que le Gauleiter a changé la direction de l’hôpital, il a continué à soi- gner les torturés et à les garder le plus long- temps possible dans son service. Il passe rapidement sur cette période, pour ne pas insulter l’avenir, comme si les Russes qui campent toujours à 10 kilomètres de la ville pouvaient revenir.

PROPAGANDE RUSSE

La chef du quartier d’Izos, dans le centre- ville, est une autre Larissa, petite femme énergique toute vêtue de rouge. Elle connaît tout le monde. Elle navigue au pied des immeubles de cinq étages, entre

les braseros des habitants qui font leur cuisine au feu de bois, faute d’électricité et de gaz. Son frère a été tué par un éclat d’obus, au début de la prise de la ville par les Russes. Elle nous présente les veuves, les torturés, les familles des collaborateurs et, dans ce chaudron de rancœurs et de peines, les récits intarissables font chavi- rer les auditeurs qui consignent la tragé- die de l’occupation russe. Ici, les victimes côtoient donc les proches des bourreaux, comme le père de Hleb Tkachenko qui se réfugie dans sa voiture en attendant que je passe mon chemin.

C’est devant des biscottes sèches au sucre que Galina, la mère de Larissa, une adorable babouchka, nous reçoit. Fièrement, elle exhibe le nouveau jour- nal ukrainien de la ville, « l’Horizon d’Izioum », qui a remplacé « le Z de Khar- kiv », dédié à la propagande russe. Page 2, un encadré montre la photo d’une femme replète d’un certain âge. C’est un avis de recherche : « Natalia lagocha est coupable d’avoir accepté de son plein gré d’être la soi-disant chef du département de contrôle des documents. Condamnée in absentia

elle est recherchée. Si elle ne se présente pas, elle risque de cinq à dix ans de prison. » Et puis, pour nous faire rire, elle nous montre le papier journal qui enrobe ses choux, ce « Z de Kharkiv » qui déployait l’endoctrinement russe en de petits enca- drés semblant destinés à des enfants : « Le premier but du président Poutine est de récu- pérer et de sauver les terres russes du Don- bass. Sa deuxième tâche est de rendre la vie de ses habitants non seulement acceptable mais utile à la patrie », explique l’un d’eux. « Savez-vous ce que Zelensky a dit quand un missile ukrainien a tué cinq enfants ? “Notre artillerie, grâce à l’aide des Américains, est enfin précise !” », raconte un autre encadré. Dans le cahier Science du même journal, on lit que « des chercheurs ont trouvé dans la mer du Nord un nouveau mollusque sans colonne et l’ont appelé Zelensky ». Quelques pages plus loin, on trouve un poème sur la Russie − « Gloire à toi, tu es la plus grande et la plus belle » −, et le photomontage d’un passeport ukrainien surmonté du Reichsadler, l’aigle du IIIe Reich.
Galina a vécu les six mois d’occupation au rythme des informations de Radio Z et, parfois, du « Z de Kharkhiv ». « Nous n’avions aucune nouvelle de l’extérieur. Enfermés chez nous, on ne savait que ce qu’ils nous disaient », soupire la vieille

dame. Et puis, un beau jour, un voisin a acheté un générateur et l’immeuble de Galina a pu voir la télé ukrainienne. « En une heure, on a appris trois mois de nou- velles, les massacres de Boutcha, mais aussi l’engagement de la communauté interna- tionale à nos côtés ! » Un peu comme dans le film allemand « Good Bye, Lenin ! » quand, après un long coma, une femme découvre le monde post-soviétique que tente de lui cacher son fils.

Nadia, qui dirige le pâté de maisons lon- geant le cimetière Shakespeare, a aussi été bercée par la propagande de Radio Z. Encore aujourd’hui, elle ne croit pas que les Russes ont commis des exactions. Ils lui ont donné de la nourriture, du dentifrice, et les médecins russes, dit-elle, soignaient les malades de la rue. Son mari est dans la construction, son beau-fils croque-mort, ils ont continué à travailler sous l’occu- pation. A l’heure du déjeuner, sa table se couvre de viande, de cèpes et d’une tarte aux fruits. Elle pense qu’il y a des « gens mauvais » dans chaque camp, et renvoie les politiciens russes et ukrainiens dos à dos : « Nous, les civils, nous voulons la paix. Nous ne sommes pas des objets, que l’on passe de main en main, d’un camp à l’autre. Un jour nous devrons bien vivre ensemble, côte à côte etplusfaceàface!»

Au moment de quitter Izioum, je vois une dame aux traits tirés sortir de sa maison. Je m’arrête : Natalia Vassilivna, 67 ans, vient de Borodychne, une ville à 40 kilomètres de là, et elle fond en larmes dans mes bras quand je commence à l’in- terroger. A la veille de l’invasion russe, elle s’était réfugiée dans les grottes des moines de Sviatohirsk, mais les religieux appartenaient à l’Eglise de Russie et lui récitaient la propagande du Kremlin plus souvent que leurs prières. Alors elle est retournée se cacher à Borodychne, dans un abri d’où les soldats de Poutine l’ont délogée après avoir pilonné la ville. Avec 32 personnes, elle a dû marcher pendant deux jours, buvant l’eau des ruisseaux, mangeant l’herbe des talus, zigzaguant entre les cratères des bombes. A Izioum, tout le groupe est monté dans des bus direction la Russie, tous sauf elle. Car une doctoresse, Svetlana Danielovna, au péril de sa vie, l’a cachée dans une clinique. Aujourd’hui Natalia a acheté un vélo et une petite charrette, et entend bien retourner chez elle : « Maudit Poutine, dites bien ce qu’il nous a fait, tout le monde doit savoir. »

 

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